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Autour de l'énergie nucléaire - article 1

 

Fin d’un monde ?

En 1970 le biologiste Ronald Ericsson a découvert la méthode pour séparer les spermatozoïdes avec le chromosome Y, de ceux avec le chromosome X. Il les faisait passer par une barrière constituée de protéines dans une éprouvette. Les spermatozoïdes avec le chromosome X avaient la tète plus grande et une flagelle plus longue, alors Ericsson supposait qu'ils s'agglutineraient dans ce liquide visqueux. Les spermatozoïdes avec le chromosome Y, étant plus fins, se déplaçaient plus vite; ils atteindraient le fond de l'éprouvette plus facilement.
Ericsson était né dans un ranch du Dakota Sud, où il avait assimilé les manières des cowboys. Il dénommait sa méthode :" tri de bétail", c'est à dire la séparation d'un individu du reste de troupeau. Le troupeau entassé, c'étaient bien sûr les X. Cette parallèle lui plaisait, de toute évidence. De temps en temps, il démontrait sa méthode en utilisant le bout du cartilage du pénis d'un taureau, comme indicateur.

Dans les années 90, Ericsson regarda les statistiques de plus de vingt cliniques qui utilisaient sa méthode, et découvrit avec stupeur que les couples choisissaient plus fréquemment des filles que des garçons. Et cela malgré le fait qu’Ericsson vantait cette méthode comme la plus efficace pour la "production" de garçons. Dans certaines cliniques, la proportion de filles était deux fois plus grande.
Une méthode plus élaborée de sélection des spermatozoïdes, nommée MicroSort, est en train de passer les tests médicaux exigés par FDA. Pour cette méthode, on sollicite les filles à 75%.

Au départ, dit Ericsson, les femmes téléphonaient en s'excusant et en expliquant timidement quelles avaient déjà deux fils. Maintenant elles téléphonent et disent sans détour: " Je veux une fille". Ces femmes regardent leur vie et pensent que leurs filles auront un bel avenir, meilleur que celui de leurs mères et grands mères ou celui de leurs fils, alors pourquoi ne pas choisir une fille?



C'est elle qui est un mec



A travers toute notre civilisation, le patriarcat - renforcé par les droits du fils ainé - à quelques exceptions près, constituait la règle autour de laquelle s'organisait notre société. En Grèce antique, des hommes mettaient un garrot sur leur testicule gauche pour qu'ils aient un garçon, les femmes se donnaient la mort (ou on les tuait) quand elles ne réussissaient pas à avoir un mâle. Maintenant cette ancestrale préférence pour avoir un fils est en train de disparaître. Même Ericsson, ce vieil âne têtu, fait un soupir en parlant de la fin d'une certaine ère: - Est- ce que c'était une domination masculine? Bien sûr. Mais il semble que c'est du passé.

Les changements culturels et économiques interagissent sans cesse. L'évolution économique du monde prend une direction, où la préférence pour avoir un garçon est en train de disparaître à travers le globe.
Prenons par exemple la Corée, qui pendant des siècles construisait une société patriarcale parmi les plus rigoureuses, Beaucoup de femmes là-bas ont été maltraitées et jouaient le rôle de servantes quand elles ne réussissaient pas à avoir un garçon, dans certaines familles on priait pour que les filles meurent. Mais dans les années 70 et 80, le pouvoir coréen a décidé de suivre la révolution industrielle en invitant les femmes à rentrer sur le marché du travail. Les femmes migrèrent vers les villes et entrèrent aux universités. Petit à petit, l'ordre traditionnel est devenu fragile. En 1990 la Corée du Sud a adopté une nouvelle loi pour que les femmes puissent s'occuper des enfants après le divorce et puissent hériter des biens. Plus encore, en 2005, la justice s'est prononcée pour que les femmes puissent donner leur nom aux enfants. Encore en 1985, la moitié des femmes déclaraient aux enquêteurs quelles "se sentaient obligées d'avoir un fils". Ce pourcentage décroissait lentement jusqu'à l'année 1991 et puis il diminua soudainement jusqu'à 15% environ, en 2003. Des changements similaires s'opèrent dans d'autres pays émergents comme l’Inde et la Chine.

Sous certains angles, les causes de ces changements sont évidentes. La force physique et l'endurance ne sont plus la clef de voûte pour une économie moderne, les sociétés qui exploitent les talents de la créativité et de la communication de tous les adultes, pas seulement la moitié d'entre eux, se développent beaucoup plus vite. La géopolitique et la culture globale suivent au bout du compte la loi de Darwin, alors, ou les autres sociétés emboîtent le pas, ou elles se marginalisent.

Dans les cercles féministes, tous ces changements sont présentés comme des lents et laborieux progrès dans la lutte pour l'égalité des sexes, qui durent encore. Mais aux Etats Unis où l'économie est la plus avancée au monde, il se passe quelque chose de beaucoup plus important. Les parents américains veulent avoir une fille beaucoup plus fréquemment qu'un garçon. 

Des psychologues d'évolution maintenaient longtemps que nous sommes imprégnés d'impératifs adaptatifs du passé: les hommes font les choses plus vite, sont plus forts, et sont généralement plus performants dans la lutte pour les ressources, ce qui aujourd'hui se traduit par une course vers le succès à Wall Street. Les femmes sont programmées pour trouver un compagnon qui serait capable de les entretenir et en même temps s'occuper de leurs descendants et cela s'exprime par des comportements beaucoup plus élastiques et inclinés plutôt vers l'éducation, faisant d'elles une sorte de prêtresses du foyer familial. Cette façon de penser bâtit notre sentiment de l'ordre naturel. Et si les hommes et les femmes accomplissaient plutôt des rôles sociaux au lieu des impératifs biologiques, qui étaient plus efficaces pendant cette très longue étape de l'histoire de l'humanité ? Peut-on admettre que les femmes s'introduisent mieux dans la nouvelle ère économique?

Des indices, nous pouvons les trouver dans des décombres de la dernière crise financière. Les hommes ont perdu trois quart des huit millions postes de travail qui ont été supprimés. Les branches d'industrie les plus touchées, sont celles, qui étaient jusque ici considérées comme typiquement masculines et identifiées avec un "macho" : le secteur de la construction, les usines, les finances. Certains emplois réapparaîtront à nouveau, mais la tendance générale n'est ni temporaire ni aléatoire. La crise a permis seulement de dévoiler - et d'accélérer- des changements profonds que subit l'économie depuis 30 ans.

Depuis quelques mois, pour la première fois dans l'histoire de l'Amérique, le taux des femmes actives a dépassé celui des hommes. L'économie des USA ressemble dans un certain sens à une fratrie ambulante de femmes, celles de classes moyennes entrent en activité, en créant un marché de travaux domestiques pour les autres femmes.

Les qualités les plus sollicitées aujourd'hui - une intelligence sociale, une communication ouverte, une bonne capacité de concentration - ne sont pas, peut être, suffisamment représentatives pour le genre masculin. Les femmes dans les régions pauvres en Inde apprennent l'anglais plus vite que les hommes, pour trouver du travail dans des centres d'appel globalisés. En Chine, plus de 40% des propriétaires d'entreprises privées sont les femmes; une Ferrari rouge est devenue leur emblème. L'année dernière, l’Islande a élu comme premier ministre Mme Johanna Sigurdardottir, qui se déclarait ouvertement être une lesbienne. Elle conduisait sa campagne électorale contre une élite masculine en la rendant coupable de la crise financière et elle a annoncé la fin "de l'époque de testostérone".

C'est vrai qu'aux Etats Unis les salaires des femmes sont inférieurs à ceux des hommes, ce qui peut être expliqué - au moins en partie - par une discrimination. On peut dire aussi qu'une grande majorité des femmes s'occupent toujours des enfants. Jusqu'à présent, peu de femmes atteignent les plus hauts places de l’échelle sociale, dominée toujours par les hommes. Mais ce n'est plus pour longtemps.

Dans la région industrielle du Nord-est et dans d'autres lieux, où l'économie post- industrielle a cassé le traditionnel partage des rôles au sein de la famille, sont apparus d’innombrables groupes de soutien aux hommes. Ils les aident pour surmonter le chômage et pour rétablir les liens perdus avec leurs familles. Mustafaa El-Scari, enseignant et employé social, s'occupe de plusieurs groupes de ce type à Kansas City. Le jour de ma visite, il affrontait un groupe spectaculairement résistant.

Aucun, parmi à peu près 30 hommes assis dans une classe de l'école du centre de Kansas City, n'est venu volontairement. Parce qu'ils ne payaient plus de pensions alimentaires, le juge leur a laissé le choix: la prison ou une semaine de cours sur la paternité.

El-Scari a déjà une idée comment parler à cette équipe mal réveillée, et sceptique: « il existe quatre sortes de pouvoir paternel. Moral, émotionnel, social et physique. Mais à la maison, vous n'avez aucun d'entre eux. Vous n'êtes qu'un salaire et aujourd'hui vous n'êtes même plus cela. Et si vous tentez d'utiliser votre pouvoir, la compagne téléphone à la police. Comment vous sentez vous avec ça ? Vous devriez être le chef de la famille et elle dit :"Dehors, salope". Elle vous dit "salope !" ».

Les hommes entre 20 à 40 ans sont blancs et noirs. Certains donnent l'impression d’avoir passé quelques nuits dehors, mais les autres ressemblent à n'importe quel travailleur. El-Scari a réussi à les attirer et continue un peu plus philosophiquement. « Quel est votre rôle? » demande-t-il. « Tout le monde vous dit que vous devriez être le chef de famille, alors vous vous sentez soudainement comme quelqu'un qui vient d'être volé. C'est toxique, malsain et vous conduit directement à l'échec ».
Il écrit au tableau: « 85 000 $. - Ce qu'elle gagne ».
Ensuite : « 12 000 $. - Ce que vous gagnez. Qui est le vrai mec à présent ? Le mec d'aujourd'hui, c'est qui ? »
On entend un léger grondement. - C'est vrai. C'est elle qui est le mec.
En s'appuyant sur le propos tenu par un homme avec lequel j'ai parlé plus tard, El-Scari a très bien défini son public. Darren Henderson gagnait 33 dollars par heure comme couvreur; jusqu'à la grande crise immobilière, quand il a perdu son emploi. Ensuite, il a perdu son domicile - "son petit bout du rêve américain" - et enfin, sa voiture. Et puis, il a cessé de payer la pension alimentaire. "On me traite comme si je ne savais rien faire" - dit-il - "mais ce n'est pas vrai..".
Pour se justifier, il sort de sa poche le permis de conduire pour poids lourds, et l'attestation d'une formation continue pour serveurs dans un bar, et puis il les jette par terre, comme une ordure qui ne sert à rien.



Développes ton coté féminin



Presque tous les hommes présents dans cette salle ont été les victimes de la fin de l'industrie lourde. Une majorité d'entre eux a essayé de vivre du travail manuel, même, quand la demande de main d'œuvre ne cessait de diminuer. Depuis 2000, l'industrie lourde a perdu presque six millions de postes de travail, plus d'un tiers, et n'absorbait plus les jeunes demandeurs d'emplois. La bulle immobilière a masqué cette situation pendant un certain temps, en créant des postes de travail dans le secteur du bâtiment. Beaucoup de ceux avec qui j'ai parlé, travaillaient comme électriciens ou bâtisseurs; l'un était un agent immobilier très sollicité. Ces postes de travail n'existent plus. En 1950, à peu près un homme sur vingt à l'âge de travailler était au chômage; aujourd'hui, cette proportion atteint un sur cinq, et est la plus haute depuis qu'on fait des statistiques.

Les hommes ne dominent que dans deux, parmi les15 métiers dont l'importance augmentera dans la prochaine décennie - le gardiennage et le métier d'informaticien. Les femmes occupent le reste: postes d'infirmier, soins à domicile, garde d'enfant, préparation de repas. Beaucoup de ces nouveaux métiers, dit Heather Boushey du Centre à la cause des Progrès en Amérique, "remplacent les tâches ménagères que les femmes faisaient autrefois gratuitement à la maison". Sur chacun de ces postes, on gagne juste de quoi vivre. Mais progressivement, le nombre de postes augmente, et ils constituent déjà un marché, dans lequel les femmes des classes populaires se retrouvent plus facilement.

Sur la liste des métiers d'avenir, on trouve de multiples demandes de soins, pour lesquelles les femmes, ironie du sort, explicitement puisent dans les anciens stéréotypes et les coutumes. Théoriquement, les hommes devaient s'y retrouver. Mais il apparaît qu'ils sont incapables de se réadapter. Au XX siècle, les mouvements féministes ont incité des femmes à faire des choses jusqu'ici réservées uniquement aux hommes - entrer sur le marché du travail sans être mariée, puis continuer à être active après leur mariage et enfin ne pas abandonner leur poste à la naissance de leurs enfants. Beaucoup de métiers qui au départ étaient considérés comme masculins - secrétaire ou instituteur - sont aujourd'hui très féminisés. Pour l'instant, je n'ai pas observé de processus inverse. Au cours de ces dernières années les écoles d'infirmières ont fait un grand effort pour attirer les hommes, mais avec peu de succès. Les IUFM voudraient aussi avoir plus d'hommes - comme une référence sociale - mais ils rencontrent des difficultés similaires.

On peut trouver de plus en plus de femmes qui occupent des postes de cadre moyen, et très nombreuses sont celles qui possèdent un diplôme très spécialisé. Selon le Bureau des Statistiques sur le travail aux USA, sur le nombre total de postes de gestion et de spécialistes, 51,4% sont occupés par des femmes contre 26,1% en 1980.Jusqu'à 54% des comptables, la moitié des employés de banques et des agents d’assurance sont des femmes, et aussi presqu’un tiers des médecins, ainsi que 45% des associés dans les cabinets d'avocats - et en plus, ces pourcentages augmentent sans cesse. Bien sûr, la marche des femmes vers le sommet de cette pyramide des postes est stoppée. Présidentes, les femmes d'influence d'aujourd'hui comme celles d'autrefois, sont considérées comme des célébrités particulières et la plupart d'entre nous peut les citer par leurs noms, même si on ne lit des journaux de business que de temps à autre :Meg Whitman chez e-Bay, Carly Fiorina chez Hewlett-Packard, Anne Mulcahy et Ursula Burns chez Xerox, Indra Nooyi chez PepsiCo. Sur la liste des présidents du magasin "Fortune", les femmes ne sont que 3% et ce chiffre n'a jamais été aussi haut.

Même si les firmes américaines ne possèdent pas trop de présidentes, celles-ci sont très appréciées ; il y a un an, elles gagnaient en moyenne 43% de plus que les hommes, sur des postes équivalents.

"Les femmes sollicitent un poste de dirigeant juste au moment où elles savent que leur savoir-faire colle très bien à la demande" écrit David Gergen dans l'introduction de son recueil d'essais " Enlightened Power: How Women Are Transforming the Practice of Leadership". De quelles capacités s'agit-il ? Dans le passé on croyait que les dirigeants devaient être agressifs et capables de rivaliser et que les hommes y sont naturellement prédisposés. Mais les études psychologiques ont compliqué un peu cette image du chef.
Pendant une expérience où on simulait des négociations, l'assertivité et l'ambition étaient les mêmes pour les femmes et les hommes; quant aux différences, elles étaient à peine décelables. En général, les hommes restaient sûrs d'eux mêmes et essayaient de contrôler la situation, pendant que les femmes prêtaient plus d'attention aux droits des autres, mais leur efficacité était comparable, écrivent deux psychologues, Alice Eagly et Linda Carly, dans leur livre, paru en 2007 :"Through the Labyrinth".
Dans le passé, beaucoup de chercheurs grossissaient ces différences, en les décrivant dans le registre vulgaire d'un stéréotype féminin : pourtant - les femmes, plus empathiques, se révèlent plus efficaces dans la recherche du sens commun et dans la pensée non conventionnelle, en apportant dans le monde impitoyable du business une sensibilité morale d'un ordre supérieur.
Dans les années 90, on pouvait supposer que cette théorie avait le vent en poupe par son aspect féministe, mais après la dernière crise, on lui prête plus d'attention. Les chercheurs regardent de plus près l'affinité qui pourrait exister entre la testostérone et une prise de risques démesurés, et commencent à se demander si les hormones ne sont pas responsables du fait que les hommes s'emballent réciproquement dans les risques encourus.* On retrouve ici l'écho de la traditionnelle perception des deux sexes : les hommes sont irrationnels et menés par les émotions, les femmes utilisent une analyse froide et équilibrée.
Nous ne sommes pas encore définitivement persuadés que la testostérone influence d'une quelconque manière les décisions en business, mais l'image du chef idéal est en train de changer. Le vieux modèle de gestion et de contrôle, où le pouvoir de décision était entre les mains d'une seule personne, est considéré comme dépassé. Les uns appellent ce nouveau modèle "post héroïque", les autres "transformatif".
Il postule, que le chef d'un groupe doit se comporter comme un bon entraîneur et utiliser son propre charisme pour motiver les autres au travail plus dur et plus créatif. Ce modèle ne se définit pas comme féministe, mais on aperçoit dans son contenu un écho de la lecture sur le sujet des différences entre les deux sexes. Par exemple, dans L'Ecole de Business de Columbia, on apprend aux élèves la gestion du personnel avec une dose de sensibilité et d'intelligence sociétale : mieux comprendre le langage du corps ou l'expression du visage.- On ne dit jamais explicitement : "Développez votre coté féminin", mais c'est clair, il s'agit de cela - dit Jamie Ladge, le professeur de business.

Les chercheurs de l'Ecole de Business de Columbia et de l'Université de Maryland ont conduit en 2008 une large analyse de données, entre les années 1992 et 2006, dans 1500 des plus grandes firmes américaines, pour déterminer les liens entre leurs résultats et la participation des femmes à la gestion de celles-ci. Les entreprises dirigées par les femmes se débrouillaient mieux, en particuliers dans le cas où la firme développait une stratégie d'innovation, dans laquelle, selon les chercheurs, la créativité et la collaboration semblent être très importantes. Voilà la façon de voir une future économie.

Peut être les femmes apportent des succès à la firme, ou alors les entreprises qui vont bien, peuvent se permettre le luxe d’embaucher les talentueuses représentantes du sexe féminin. Une chose est sûre: les entreprises innovatrices qui ont du succès, emploient des femmes comme dirigeants. Les chercheurs de Columbia et de Maryland ont donné un rang pour chaque branche industrielle selon le pourcentage de femmes directrices. En bas de cette échelle se trouve les zombis d'activité économique du passé : les chantiers navals, l’immobilier, l'industrie minière, la métallurgie, les constructions industrielles.

Bien sur, cette analyse du marché de travail d'aujourd'hui nous enseigne uniquement sur son état actuel. Pour savoir à quoi ressembleront dans le futur le marché du travail, l'économie, et la culture, il faut se rendre dans les colleges (l’écriture et le sens de mot est américain)
américains et les écoles professionnelles pour y observer une silencieuse révolution qui s’y prépare.

A présent 60% des diplômes universitaires, la moitié des diplômes en droit et en médecine et 42% des MBA appartiennent aux femmes. A souligner que 60% des femmes possèdent une licence, un minimum nécessaire pour assumer sa prospérité. Plus d’hommes que de femmes s'arrêtent au niveau de baccalauréat. C'est un pivotement à 360 degrés par rapport aux années 70.

Ce printemps, je me suis rendue dans plusieurs établissements de Kansas City, pour me faire une opinion au sujet de la dynamique des sexes après le bac. J'ai commencé par le campus du Metropolitan Community College. Le Metropolitan est lieu d'apprentissage professionnel où les gens acquièrent des connaissances pour s’insérer dans une économie qui change. Comme dans la plus part des établissements de ce type, on n'y trouve que des femmes. L'après-midi, dans la cafétéria, on aperçoit beaucoup de femmes qui tentent de se concentrer plutôt sur les manuels de biologie que d'ouvrir les SMS de leurs nourrices. Un autre groupe des filles devant les toilettes se tressaient réciproquement les cheveux. Une femme, encore en tenue de bloc opératoire, somnolait dans l'ascenseur.

Quand en 2005 Bernard Franklin est devenu directeur du campus, il a annoncé à ses employés que leur priorité dès maintenant serait "l'admission d'un plus grand nombre de garçons". Il a initié des programmes d'aide, des classes de garçons et des associations d'étudiants. Des années sont passées et la vague des filles est toujours la même - à présent c'est 70% du nombre total d'étudiants. Elles apprennent pour devenir infirmière ou enseignante. Ce sont la plupart des Afro-américaines, de quelques années plus âgées que la majorité des étudiants et - dernièrement - des femmes blanches des milieux populaires de la banlieue en recherche d'un diplôme à moindre prix. Et les hommes ? Ils ne se mobilisent pas davantage.

- Je me souviens d'un garçon, qui était vraiment doué - m'a dit un des conseillers d'éducation.- Mais sa capacité en lecture ne dépassait pas la sixième, et il était bien intimidé par toutes ces femmes. Il cachait ses livres devant ses potes, qui se moquaient de ses projets. Ensuite ont apparu des excuses: "Ce printemps, il faut que je joue au foot", "Cet hiver, il fait trop froid". Il a lâché.

Les postes biens rémunérés, garantis par les conventions collectives ont commencé à disparaitre il y a 30 ans. A Kansas City, par exemple, la métallurgie a été remplacée par l'industrie pharmaceutique et par l'informatique. - Le marché n'est plus aussi opportun pour les hommes - dit Jacqueline King du Conseil d'Education d'Amérique. - On pouvait s'attendre à ce que les deux sexes poursuivraient en college ( l’écriture et le sens de mot est américain).
Mais les garçons n'ont pas voulu.

En 2005, un groupe d'études King a mené une enquête parmi les adultes des milieux défavorisés qui poursuivaient le college. Il en ressort que les hommes ont plus de difficultés pour s'engager dans les études, et ce malgré un besoin urgent d'argent. Ils ont avoué se sentir isolés et avoir des difficultés pour demander une aide. Les mères qui sont retournées à l'école se présentaient comme un exemple à suivre pour leurs enfants. Les pères doutaient s'ils maintiendraient leur position de chef du foyer.

Parmi les étudiants issus d'une famille riche, la différence entre les sexes dans les colleges traditionnels, a pratiquement disparu. . Mais les étudiants issus de milieu favorisé s'inscrivent plus fréquemment dans les établissements privés qui régissent leurs propres règles. En cachette, ils ont entamé une nouvelle action affirmative dans laquelle les garçons jouent la rôle de quelqu'un faible, nécessitant du soutien.
En 2007, les économistes Sandy Baum et Eban Goodstein ont calculé que dans les établissements humanistes d'élite, être un homme augmente la chance d'être admis entre 6,5 et 9 pourcent. Ce jour là, la Commission Américaine des Droits de l'Homme a voté l'ouverture d'une enquête au sujet d'une affaire que certains enseignants appellent " le secret de Polichinelle": les établissements privés pratiquent une discrimination pour recruter davantage de garçons pour maintenir un équilibre entre les sexes.
Jennifer Delahunty, la doyenne responsable du recrutement et de l'aide financière dans le Kenyon College d'Ohio a dévoilé ce secret dans un texte paru au " New York Times" en 2006. "L'équilibre entre les sexes au recrutement - c'est un sujet tabou", écrivait l'auteur. Une candidate typique se prend en charge elle même - organise une visite sur le campus, demande un rendez- vous avec le corps d'enseignants. Mais au collège on voit plus d'un garçon "assis dans un canapé, quelquefois avec les yeux fermés, et c'est sa mère qui le guide où il faut aller et que faire ".- On dit quelquefois: quel bel essais écrit par sa mère.

Pauvre vieux garçon

Ce n'est que du plaisir d'observer ces jeunes filles et ces jeunes femmes condamnées au succès. Mais permettre que des générations de garçons grandissent avec des sentiments de déracinement et de dépassement n'est pas une bonne recette pour un avenir radieux.
Chez les hommes, l'entraide n'est pas très bien organisée et l'accès aux services sociaux est difficile: aux USA, les groupes qui se battent pour leurs droits s'expriment contre les femmes d'une manière haineuse. Le statut de mariés est bref ou quasiment inexistant, les enfants sont élevés sans parents. La montée en force des femmes est ressentie sans joie et aperçue comme un danger.

A quoi ressemblerait une société menée par le genre féminin ? On s'en fait déjà une idée. Pour la première fois en Amérique, dans la tranche d'âge 30-40 ans, on peut constater plus de femmes avec un diplôme de college que d’hommes. Cela induit des changements profonds dans les familles de banlieue.
En 1970, les femmes apportaient de 2 à 6 pour cent du revenu des ménages. Aujourd'hui, en travaillant, elles participent au budget familial à hauteur de 42,2 pourcent, et quatre mères sur dix - beaucoup sont célibataires - représentent l'unique ressource de la famille.

 On s'aperçoit également qu'à partir des années 1970, le mariage a subi des transformations. Le revenu des femmes est le facteur majeur dans l'ascension sociale d'un couple et un nombre significatif de travailleuses a un problème pour trouver un partenaire dont le revenu ou l'éducation soit comparables au sien et renonce à se marier. En 1970, quatre-vingt pour cent des femmes entre 30 et 40 ans étaient mariées, aujourd'hui seulement 60 %. En 2007, parmi les Américaines qui n'ont pas achevé le second degré d'enseignement, on pouvait trouver 47 % de femmes mariées. Inutile de s'apitoyer sur les vieilles filles, le vrai perdant- le seul, dont la situation financière ne s'est pas trop amélioré depuis 1970 - est le vieux garçon, peu importe s'il est riche ou pauvre, avec ou sans études. Soyez ravies mesdemoiselles, c'est la soirée d'enterrement de la vie de garçon qui est finie.

La sociologue Kathryn Edin a étudié pendant cinq ans les mères célibataires dans la banlieue de Philadelphie. Elle a découvert que dans certaines cités règne le matriarcat. Selon elle, les féministes ne se sont pas aperçues," quel pouvoir possèdent les femmes, quand elles ne sont pas liées par un mariage". Elles prennent "toutes les décisions majeures": vouloir un enfant, comment l'éduquer, où habiter.- Trente ans auparavant, les normes culturelles étaient telles, qu'un père pouvait dire : "Attrapes moi, si tu sais le faire". Maintenant ils veulent être père, mais il leur manque la conviction qu'ils combleraient les espérances des femmes.

Les femmes ne les veulent pas comme maris, ils n'ont pas de ressources stables. Alors qu'est-ce qu'il reste ?
-Rien - dit Edin - ils n'ont rien. Les hommes ont été anéantis pendant la crise des années 90 et depuis leur situation ne s'améliore pas. Et maintenant, c'est tout simplement très grave.

Ce n'est pas, comme aime dire Edin, "le nirvana féministe". Le phénomène d'enfants hors mariage" progresse dans les faubourgs, les cités de mobile home, à la campagne et dans les petites villes" et monte dans l'échelle sociale. Après une brève période de stabilisation, le nombre d'enfant hors mariage a augmenté jusqu'à 40% ces dernières années. Pour de nombreuses mères, la fin de mois est difficile. Celles qui ont réussi, travaillent, étudient et se dépassent pour nourrir les enfants, puis, s'endorment dans l'ascenseur d'une école infirmières

Ces dernières années, les chercheurs avançaient plusieurs théories au sujet de la crise d'institution du mariage dans les classes populaires: la protection sociale plus élevée, la disparition de postes de travail, suivie d'un manque de bons candidats au mariage. Mais pour Edin, la théorie la plus attirante est celle selon laquelle le mariage a disparu parce que les femmes mettent la barre trop haut pour l'ensemble des hommes qui les entourent. L'avenir de toute une nation pourrait être comme le présent de nombreux Afro-Américains des classes inférieures - les femmes montent dans l'échelle sociale
et les hommes ne les suivent pas.


Un fier boy toy

La culture Américaine de mass media produit sans fin des variations sur le sujet d'un mâle oméga, qui dans une meute de loups est placé encore plus bas qu'un spécimen beta. Ce type raté, fréquemment sans emploi, mal à l'aise avec les femmes, peut se décliner comme un eternel adolescent (dans "En cloque, mode d'emploi" ou "40 ans, toujours puceau" de Judd Apatow), ou comme un misanthrope dépourvu de charme (dans "Greenberg" de Noah Baumbach), ou encore comme un insoucieux flémard accroché à son canapé (dans la publicité de la bière Bud Light).

En même temps, il apparaît un nouveau genre de femelle alfa, qui inquiète et quelquefois fait peur. Au départ, la métaphore "panthères" était utilisée dans des blagues à propos de vieilles dames désespérées. Cela devient une expression du jour, même à Hollywood, siège des réalisateurs , la cinquantaine dépassée, se baladant avec des juvéniles starlettes sous les bras. Susan Sarandon et Demi Moore possédant leurs propres "boy toy", et Aaron Johnson, l' héroïne de "Kick-Ass" à 19 ans, se porte avec fierté comme "boy toy" d'une femme de 24 ans plus âgée. La journaliste du "New York Times" Gail Collins a écrit il y a peu, que le phénomène des panthères concerne de plus en plus" de jeunes Américains désespérés, qui s'accrochent aux manches de vieilles dames riches, que ces dames directement. Le film "In the Air" de Jason Reitman, qui parle des licenciements sur fond de la crise, touche le cœur du problème en ce qui concerne la désintégration de l'ego de l’homme américain. Une plus jeune camarade dit au héros du film, joué par George Clooney, qu'il est trop vieux pour être attractif, et puis, il est rejeté à nouveau par une autre femme, plus âgée cette fois, et pour laquelle il tombe amoureux , après avoir couché avec elle, et c'est plus tard , qu'il s'aperçoit qu'elle est mariée. George Clooney! Si le plus sexy des hommes vivant est rejeté dans le film deux fois (et abusé sexuellement), alors quelles perspectives pour les autres ?

En même temps, le cowboy Marlboro, le célèbre dompteur d’ animaux sauvages, semble être exagéré et dépourvu de sens, même, pour un besoin publicitaire. Ses équivalents contemporains, ce sont les hommes à l'air froissé de la publicité Dodge Charger qui ont été présentés pendant le dernier match final de la ligue de foot. On pouvait supposer que parmi tous les jours de l'année, le dimanche du Super Match devrait être au maximum destiné à célébrer un macho. Et pourtant, les quatre hommes regardent la caméra sans sourire, presque immobiles, faisant de temps à autre un clin d'œil ou flageolant sur leurs jambes. Ils ont l'air d'être sous calmants. Leurs lèvres ne bougent pas, mais une voix off explique comment ils ont été froissés par les exigences farfelues de leurs employeurs, les écofachistes et les femmes. Surtout par les femmes."Je baisserai la couverture du WC, trierai des ordures et porterai ton fard à lèvres". La dernière expression - le fard à lèvres - est crachée avec une petite émotion; c'est la seule trace de colère, enfouie profondément, contre "dominatrix". A ce moment là, la publicité devient un rêve, Dodge Charger roule à toute vitesse, avec un hurlement du moteur vers la caméra et sur l'écran apparait une grande écriture : LE DERNIER BASTION DE L'HOMME. Mais ce jeu de mots ne convainc pas. Après cette exhibition de silence et de passivité, on ne peut que s'imaginer une femme au volant, avec des lèvres qui brillent.

rédaction polonaise : Miłada Jędrysik rédaction française : Franela


Le texte entier est apparu dans "The Atlantic Magazine"

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